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La Maison du Vampire, roman de George
Sylvester Viereck. The House of the Vampire. Traduit de l'anglais (États-Unis) par Jean Marigny. Épuisé. La Maison du Vampire de G.S.Viereck, roman écrit en 1907, fait partie de ces classiques de la littérature fantastique aujourd'hui plus ou moins tombés dans l'oubli. Ce n'est qu'à une époque récente que l'on a redécouvert ce roman aux États-Unis et il est totalement inédit en France. C'est pourtant l'un des tout premiers ouvrages du XXe siècle qui traitent du vampire psychique. Il est traduit et présenté pour nous par Jean Marigny, spécialiste du vampire en littérature. Couverture illustrée par Fernando Goncalvès-Félix.
ISBN-10 2-908254-42-5. |
Si le thème du vampire traditionnel a fait son apparition en 1819 dans la littérature en prose avec la nouvelle de Polidori, celui du vampire psychique est apparu plus tardivement. La première occurrence de ce personnage est sans doute le roman, pratiquement introuvable aujourd'hui, de l'Américain Charles Wilkins Webber, Spiritual Vampirism: The History of Etherial Softdown and Her Friends of the New Light, publié à Philadelphie en 1853. Plus raffiné que le vampire sanguinaire mais aussi beaucoup moins populaire, le vampire psychique, avant la publication de La Maison du Vampire, n'a inspiré que quelques romans comme Clara Millitch de Tourgueniev (1882), The Princess Daphne d'Edward Heron-Allen (1888) et The Parasite de Conan Doyle (1891), encore que l'appellation de «vampire psychique» pour qualifier l'héroïne de ce dernier roman soit discutable, ainsi que quelques nouvelles comme «Old Aeson» d'Arthur Quiller-Couch (1891) et «Luella Miller» de Mary Wilkins-Freeman (1903).
Contrairement à son cousin des Carpates, le vampire psychique n'est pas nécessairement, même si cela arrive parfois, un mort-vivant. Comme l'indique le terme, il ne boit pas le sang de ses victimes mais se contente, si l'on peut s'exprimer ainsi, d'absorber à distance leur force vitale. Cette opération n'entraîne pas nécessairement la mort des intéressés, mais le sort qui leur est réservé n'est guère plus enviable, comme on pourra en juger dans le roman de Viereck. Il y a en fait plusieurs sortes de vampires psychiques: il y a ceux qui, comme Reginald Clarke, absorbent indûment le talent des artistes ou des écrivains qu'ils rencontrent pour se les approprier, il y a ceux qui, comme les vieillards imaginés par Claude Farrère dans son roman La Maison des hommes vivants (1911) ou encore Miss Avenal, héroïne d'une nouvelle de W. F. Harvey publiée en 1928, parviennent à l'immortalité en absorbant sans cesse l'énergie vitale d'individus plus jeunes qu'eux. On trouvera même dans la science-fiction des vampires psychiques très originaux, comme l'Alendar, dans la nouvelle de C. L. Moore, «Soif noire» (1934), extra-terrestre qui maintient des jeunes femmes en captivité et qui se nourrit... de leur beauté.
Toute proportion gardée, le roman de Viereck est, en ce qui concerne le vampire psychique, l'équivalent de Dracula en ce qui concerne le vampire traditionnel, même s'il est beaucoup moins connu. Reginald Clarke, à première vue, est moins terrifiant que l'aristocrate transylvanien imaginé par Bram Stoker, mais il est néanmoins extrêmement sinistre et sa diabolique personnalité se révèle progressivement tout au long du roman. La Maison du Vampire est un roman qui a sans doute un peu vieilli car notre sensibilité est très différente de celle qui existait à l'époque où il a été écrit. On pourra sans doute trouver exagérée la sensiblerie quelque peu larmoyante des personnages et regretter le côté ouvertement mélodramatique de l'intrigue. Sur le plan du style, on reprochera peut-être à l'auteur d'abuser des métaphores et de trop aimer les aphorismes et les digressions pseudo-philosophiques dont certaines font sourire aujourd'hui. Mais tout cela confère au roman un charme un peu désuet qui n'est pas désagréable. On peut remarquer, par ailleurs, que dans ce roman écrit au début du XXe siècle, on retrouve certaines des préoccupations que nous avons à l'aube de ce XXIe siècle, à savoir une remise en question de la raison toute-puissante et une incontestable nostalgie des temps reculés où le surnaturel avait droit de cité.
L'étude psychologique des personnages et tout particulièrement du vampire est en revanche très subtile, l'auteur sait ménager le suspense et l'on trouve quelques temps forts comme la confrontation finale entre le héros et sa jeune victime. Pour toutes ces raisons, nous pensons que ce roman méritait d'être tiré de l'oubli et nous espérons à l'aube du XXIe siècle que nos lecteurs l'apprécieront.
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